Comment aidons-nous les syriens?


En Novembre 2013, l’armée entra dans notre village. Dans la foulée de leur entrée un groupe de bénévoles (musulmans et chrétiens) se sont réunis autour du monastère pour fournir les villageois des besoins fondamentaux. Le groupe a grandi lentement, et maintenant ils sont responsables de la distribution d’'aides humanitaires dans de grandes parties de la région du Qalamoun, ainsi que dans certains quartiers de Damas (voir la carte ci-dessus). Ils n’auraient pas pu lever un doigt si ce n’était grâce à l'œuvre majeure de Mère Agnès Mariam et du Père Daniel Maes, qui, par leurs contacts à travers le monde, font rentrer des conteneurs avec des besoins de base et recueillent de l'argent pour la souffrance des Syriens. Voici leur histoire. Cliquez ici pour faire un don.

La pauvreté à Qara

 

Depuis novembre 2013 notre village a été libéré. Avant ça nous vivions dans une situation très difficile. (vous pouvez lire le récit de la libération de notre village et du monastère dans l’article : « Vie durant la guerre) ».

 

Aujourd’hui  le village a retrouvé une grande partie de sa population d'origine. Les marchands de fruits et légumes travaillent comme avant; nous avons un nouveau maire et tous les enfants sont retournés à l'école. C’est principalement grâce à notre groupe de bénévoles, "le groupe de l'Amour et de la Paix" que le village a retrouvé son rythme normal.

  

Après la libération du village, ils n’ont pas épargné leurs  efforts pour fournir les personnes dans le besoin de paquets de nourriture et de produits hygiéniques qui nous viennent des bienfaiteurs de l'étranger  à travers Mère Agnès  Mariam. Aujourd'hui, les quelques bénévoles du début sont devenus une grande équipe d’une trentaine d’hommes et de femmes. Nombreux d’entre eux sont maintenant des employés officiels du Croissant-Rouge en Syrie, département Qara. Une partie des secours pour Qara vient donc du Croissant-Rouge et une autre partie de nos bienfaiteurs étrangers. Notre nouveau bâtiment est devenu aujourd'hui un dépôt de colis alimentaires, assez pour fournir de la nourriture et des produits hygiéniques pour 300 familles durant un mois [au moment de la rédaction]. A côté de Qara nous avons aussi des points de distribution d’aides humanitaires à Jeramana (Damas) et Khrab (Tartous). 

 

Dieu merci, notre région est maintenant plus ou moins sécurisée, contrairement à d'autres endroits. Pourtant, les besoins restent importants ici: le chômage, les longues coupures de courant qui compliquent la vie pour les petites entreprises, qui empêchent les agriculteurs de donner de l'eau à leurs légumes (puisqu’il faut souvent allumer un moteur) .... Il y a aussi une pénurie croissante de gaz et de fuel pour chauffer les maisons (les hivers peuvent être forts ici  vu que  le village est situé à 1200m d'altitude). Souvent, les personnes les plus pauvres vivent dans des maisons en béton rudimentaires ou même dans des maisons en terre. La semaine dernière, deux de nos bénévoles sont allés visiter les maisons des plus pauvres dans notre village de Qara. Souvent, il faut vraiment les chercher. Ils vivent, cachés dans la masse, ils ont honte de leur pauvreté. Voilà le récit de leurs visites:

 

Par exemple, dans la famille Kahil le père a une jambe artificielle jusqu'à son genou. Il n'a pas de travail. Son fils handicapé doit porter des couches et ses médicaments coûtent à lui seul 10 000 LS (livres syriennes) par mois. (Il faut dire que la livre syrienne vaut cinq fois moins qu’au début des événements en 2011, beaucoup de produits sont donc devenus 5 fois plus chers). Dans la famille Nassif le papa a un cancer à la tête qui met une pression sur son œil. Son médicament est très cher. Toutes les deux semaines, il doit se rendre à Damas pour un test sanguin. Il a trois enfants. Sa femme est au chômage.

 

Dans une autre famille, une veuve a un pied artificiel qui doit être renouvelé tous les deux ans. Elle a quatre enfants à l'école, il n'y a donc aucune rentrée d'argent. Ils vivent dans de très mauvaises conditions. Une autre veuve a trois enfants qui fréquentent l'école.

 

Dans la maison de la famille Nassif, maman et papa ont environ 70 ans. Leurs deux filles sont malades; les parents doivent les accompagner à la salle de bains. Ils sont très pauvres. Trois ou quatre autres familles n’ont plus de père, les enfants vont à l'école et  la mère est au chômage. Un autre couple de personnes âgées n'a pas de revenus, et leur fille vit avec eux. Leur fils a un retard mental, il ne peut pas travailler.

 

Il y a beaucoup d'histoires de ce genre. Nous essayons de les aider avec l'argent et les aides  qui viennent de partout dans le monde. Au moins, nous voulons leur assurer les soins médicaux et leur fournir des produits alimentaires de base.


Le nouveau bâtiment du Monastère: ici  nous rassemblons les aides qui nous viennent de partout au monde.

Damas

 

Nous avons décrit la situation à Qara. D'autres régions, comme Damas et sa banlieue, sont cependant bien pire. Beaucoup de personnes là-bas ont eu leurs maisons détruites et survivent dans des parcs publics. Innombrables sont les familles qui ont eus des membres de leur famille kidnappés par des extrémistes. S’ils ont l'argent ils peuvent payer la rançon, mais souvent ils ne le l’ont pas. Et ainsi des membres de famille disparaissent comme ça, sans avertissement par le biais d'enlèvements, par des voitures piégées ou à travers des bombardements aveugles de terroristes envoyés depuis les banlieues de la ville.

 

Tout est devenu très cher. Avant la guerre, la nourriture était très bon marché. Il était très rare de voir quelqu'un qui avait faim. 10 pains coutaient 25 LS. (Environ un demi-euro). Aujourd'hui, les prix du pain sont maintenus bas par le gouvernement, mais les prix de tout le reste a augmenté radicalement. Les gens sont en manque de presque tout. Un membre de notre équipe humanitaire de "l'Amour et de la Paix" nous a dit: «Je viens d'avoir ma femme au téléphone à Damas. Un homme a sonné à notre porte demandant si nous avions un manteau pour lui. Ma femme m'a aussitôt téléphoné pour me demander où étaient empilés les cartons de manteaux pour les pauvres. Je lui ai dit que je ne savais pas mais qu'elle devait chercher à fond et que, si elle ne trouvait pas, elle devait lui donner un de mes manteaux." Après je l'ai vu regarder les étoiles avec des yeux tristes en disant: «Je ai un manteau, et tant de gens n’en ont pas". [Aujourd'hui, (Janvier 2015), nous avons entendu la nouvelles tragique que des enfants sont morts de froid à Damas].

 

Il m'a raconté une autre histoire: un cousin à lui aidait à distribuer des colis alimentaires et de santé aux pauvres à Damas. Dernièrement cependant il avait arrêté. Un jour il alla rendre visite à sa tante, une vieille dame très sainte qui ne fait que prier. Elle est aimée par tout le monde. Il lui demanda de prier pour lui. Elle a répondu: «Je prie toujours pour toi, mais pourquoi tu n’aides plus les pauvres? Il faut que tu les aides !" Puis l'homme de notre équipe humanitaire me regarda en souriant: "maintenant il nous aide à nouveau et il apporte même des amis avec lui".

Création d'emploi

  

Plus important que fournir de la nourriture et des vêtements est la création d'emploi. Mère Agnès Mariam a fondé une petite usine à Homs. Ici, à Qara une usine de tapis est sur le point de rouvrir (voir photo). En même temps nous receuillons des machines à coudre pour être en mesure de donner du travail aux femmes qui restent à la maison. Voici le secteur (la création d’emploi) où nous pourrions utiliser des idées et de l'expertise. Nous sommes aussi à la recherche de sources alternatives d’énergie comme des panneaux solaires pour faire face à la pénurie d’électricité.

Croissant Rouge

 

Comme nous l'avons dit au début de cet article, notre équipe de bénévoles, l'équipe de "l'Amour et de la Paix" a maintenant grandie et est devenue responsable du Croissant-Rouge, département Qara. Plusieurs fois maintenant des formateurs du Croissant-Rouge sont venus au monastère pour former le groupe de Qara. Les témoignages de ces jeunes formateurs vont souvent droit au cœur. Cet été un jeune étudiant de Damas, qui est un bénévole du Croissant-Rouge, nous a dit: "Je ne vois pas mes parents. Je travaille toujours avec le Croissant-Rouge. Souvent, je travaille 16 heures par jour pour livrer des colis alimentaires et de santé, pour prendre soin des malades et des blessés".

 

Dans leur dernière session ici au monastère, ils étaient environ 30 volontaires du Croissant-Rouge. Certains d'entre eux avaient vraiment soif de connaître le Seigneur Jésus et ont passé de longues soirées avec nous. L'affliction de cette guerre est vraiment mystérieuse. Ils ont posé des questions du genre: «Est-ce que cette guerre est une punition de Dieu?" La Bible nous enseigne:


«Vous avez oubliez l'exhortation qui vous est adressée comme à des fils: Mon fils, ne méprise pas le châtiment du Seigneur, Et ne perds pas courage lorsqu'il te reprend; Car le Seigneur châtie celui qu'il aime, Et il frappe de la verge tous ceux qu'il reconnaît pour ses fils. Supportez le châtiment: c'est comme des fils que Dieu vous traite; car quel est le fils qu'un père ne châtie pas? Mais si vous êtes exempts du châtiment auquel tous ont part, vous êtes donc des enfants illégitimes, et non des fils. D'ailleurs, puisque nos pères selon la chair nous ont châtiés, et que nous les avons respectés, ne devons nous pas à bien plus forte raison nous soumettre au Père des esprits, pour avoir la vie? Nos pères nous châtiaient pour peu de jours, comme ils le trouvaient bon; mais Dieu nous châtie pour notre bien, afin que nous participions à sa sainteté. Il est vrai que tout châtiment semble d'abord un sujet de tristesse, et non de joie; mais il produit plus tard pour ceux qui ont été ainsi exercés un fruit paisible de justice. Fortifiez donc vos mains languissantes Et vos genoux affaiblis." (Hebreux 12,5-12)


Le témoignage d’amour, d'unité, et de compassion sincère qui germe de toute cette misère nous remplis d'espoir. Nous sommes vraiment consolés de voir la force du peuple syrien, même parmi tant d'afflictions. La force extraordinaire de l'âme syrienne est un fait remarquable. Une religieuse française qui est très proche du monastère vient de nous visiter. Elle a dit qu'elle a été fortement interpellée en voyant le regard calme et serein d'une infirmière à qui elle avait parlé à l'hôpital pas loin de chez nous. Elle lui a demandé: «D’où êtes-vous" "De Homs", répondit-elle. "Oh, vous allez bien?" "Oui, nous avons tout perdu, mais grâce à Dieu mes enfants et mon mari sont en vie". Elle souriait. La religieuse française nous disait que personne en France ne réagirait devant une situation pareille d’une manière si digne et si sereine. En tout cela, et dans bien plus encore, nous sommes confiants dans le travail du Seigneur qu’il fait dans sa Syrie bien-aimée. Maintenant, aidez-nous à aider les Syriens!