Nos constitutions



Il était une fois un beau monastère dans le désert syrien, à 90 km au nord de Damas, dans un village nommé Qara. Le monastère remonte au 6ème siècle et est dédié au grand martyr Saint Jacques le Mutilé. De son passé glorieux il ne restait que des ruines. Avant que cet endroit fût un monastère, il était un bastion romain, et avant cela un temple païen. Le Seigneur toucha de compassion le cœur de Mère Agnès Mariam qui voulait le restaurer. Le but était d'y établir la vie monastique orientale en l'enracinant d’une nouvelle façon dans l'Eglise locale, dédié à l'unité des chrétiens, avec un esprit d'hospitalité. Dans ce qui suit sont rédigées nos Constitutions à caractère canonique, avec des articles appartenant au droit particulier et à la spiritualité propre à notre Ordre. 

  

Introduction

 

1.  Le Monastère de Saint Jacques-le-Mutilé (ou l'Intercis) est un site antique remontant au VIe siècle. En 1993, lors d’une visite providentielle, Mère Agnès-Mariam de la Croix, carmélite exclaustrée, décide d’y fonder le premier monastère antiochien. Le site est devenu, après sa réhabilitation, un monastère indépendant sous la vigilance de l'Évêque du lieu (sui iuris eparchialis) d'après les canons des Églises Orientales Catholiques N° 410-572. S.E. Mgr Abraham Nehmeh, Métropolite Grec-Melkite Catholique de Homs, Hama et Yabroud, promulgua un Décret Épiscopal [1] le 14 Septembre 2000 érigeant à la fois un monastère et une communauté monastique féminine sous le titre : « moniales de l'Unité Antiochienne » ayant pour maison-mère le dit Monastère de Saint Jacques-le-Mutilé et dont le but suprême est de « servir l'Unité entre les Églises Patriarcales Antiochienne» en renouvelant l'héritage culturel Antiochien commun au niveau spirituel, théologique, patristique, liturgique et artistique». [2]

 

2.  S.E. Mgr. Nehmeh élargit la fondation pour englober une branche monastique masculine, le jour de l'Assomption de la Vierge Marie, le 15 Août 2004. Le 25 mars 2005, il promulgua le code de formation des aspirants à la fondation de cette branche.

 

Les constances de la nouvelle fondation

 

 3. L'Ordre Antiochien de l'Unité est une Fédération de Monastères Orientaux à caractère cénobitique et à vocation anachorétique. Elle s'insère dans les Églises locales pour une intercession prophétique en vue de l'Unité eschatologique de l'Église, Épouse du Christ et un service de charité pour panser les blessures de la grande détresse des derniers temps. Il se caractérise par :

 

·  Insertion dans l’Eglise locale c.à.d. Antioche, la Grande Eglise de Dieu, pour se dédier au service de l’unité antiochenne et vénérer filialement tous les patriarches d’Antioche, particulièrement notre Saint Père le Patriarche de notre Eglise grecque-melkite catholique, en communion totale avec Notre Saint Père le Souverain Pontife Romain et de là, s’élancer vers les horizons oecuméniques en s’ouvrant amoureusement à toutes les Eglises et les religions ;

·  Retour aux sources de la vie monastique orientale, en particulier les voies de l’union à Dieu à travers la prière du coeur et l'idiorythmie sous la mouvance de l'Esprit de Dieu;

·  Diffuser l’Evangile de la Vie et les enseignements des Pères, surtout les voies antiques du combat des pensées, de la guérison spirituelle et de l'union et transformation en Dieu;

·  Aider par l’accueil et l’écoute l’homme contemporain, surtout la jeunesse, à construire son humanité sur le rocher de la vie spirituelle sans pour autant nuire à la vie de prière et à l’intimité avec Dieu;

·  Contribuer à la préservation du patrimoine des Eglises d’Antioche et chercher à restaurer la culture humaine à partir de l’Evangile à l’instar des antiques monastères qui avaient su sauvegarder la civilisation et la transmettre à toute l’humanité ;

·  Le monastère est un lieu de sainte philoxénie : il  accueille les retraitants et les résidents sans porter atteinte au règlement de la vie monastique ;

Notre vocation dans l'Église locale

 

4.  L'Ordre de l'Unité d'Antioche (LOUA) a été fondé dans le Monastère de Saint Jacques-le-Mutilé par un acte de foi en la Providence salvifique du Père, un acte d'espérance en la deuxième Venue du Christ et un acte de charité envers l'Église locale, dans la Communion du Saint-Esprit.

 

5.   L'Église locale, celle d'Antioche, la Grande Cité de Dieu, s'est révélée devant nos yeux avec sa réalité glorieuse et douloureuse, dans le mystère de la Beauté du Dieu vivant, occultée comme dans Son Temple. Elle nous appelait pour venir à son aide, en consacrant et sanctifiant nos âmes à travers la voie monastique et dans la transformation de l'Image de Dieu à l'intérieur de nous en une véritable ressemblance en Christ, le Nouvel Adam. Mais aussi à travers la découverte de son héritage perdu et la remémoration de ses Pères, de ses Saints et de ses vénérables Docteurs.

 

6. L'Église locale c'est la permanence de l'Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique dans le temps et l'espace de la réalité quotidienne. C'est elle qui fait écouter, voir et toucher le Verbe de Dieu, comme dans Son Corps mystique[1]. Elle est la voie d'accès à la Communion de l'Esprit-Saint, gage de l'Unité au ciel et sur la terre.

 

7. Sans l'Église locale, point de racines dans le temps et l'espace à l'Église universelle qui demeure sans visage ni incarnation. Point d'identité incarnée au chrétien. C'est par cette Église locale que nous comprenons l'harmonie totale entre le mystère de la création, le mystère de l'Incarnation salvifique et le mystère de la sanctification. Elle est la réalité spatio-temporelle de la Révélation divine et le lieu de la rencontre illimitée entre Dieu et l'homme, ici et maintenant.

 

8.    L'Église locale est notre mère, comme la Vierge Marie est notre mère. Elle nous nourrit de son lait qui mêle, à l'esprit de l'Évangile, le mystère de notre histoire, la quintessence de notre héritage, la vérité de notre identité. Elle est l'espoir de l'héritage humain puisqu'elle annonce sa visite de la part du Très-Haut. En elle resplendit le lendemain lumineux du Salut.  Beaucoup oublient l'Église locale, leur mère et, ce faisant, ils s'éloignent de leur identité et perdent le sens de leur existence et la substance de leur vocation. Ils abandonnent leur terre, oublient l'héritage de leurs Pères, délaissent leurs traditions et perdent la jonction entre les pères et les fils, entre le passé et l'avenir. Or, celui qui est frappé d'amnésie perd son identité et erre, sans but, sur la face de la terre, orphelin de sens.

 

9.  Où est l'Église locale ? Elle est l'extension du Corps du Christ qui passe par moi, si j'accueille Sa Foi. Elle est le présent de l'Économie salvifique de Dieu qui atteint mon présent, l'Orient de Jésus-Christ qui atteint mon humanité et la brise de l'Esprit-Saint qui me révèle le mystère de l'Amour Éternel de Dieu envers moi. Je l'entends lorsque je prie sa Liturgie. Je la vois dans mes pères et mes frères. Je la touche chaque fois que je contemple un signe de l'intervention de Dieu dans ma vie à travers la Foi qu'elle me transmet.

 

10. Le Seigneur a voulu, le jour de la Pentecôte que les nations écoutent la proclamation du premier Kérygme Apostolique dans ses diverses langues et non point dans la seule langue araméenne, ce qui nous enseigne la méthode de l'Esprit qui renouvelle par Sa lumière et par Son feu l'appartenance historique et culturelle pour en faire une partie indissociable des trésors de l'héritage Christique[4].

 

11.  L'Église locale est l'humanité sauvée dans l'Église d'Orient en général et dans celle d'Antioche en particulier. Elle forme partie de la diversité de la tunique multicolore et sans couture du Christ. Quant à son aspect local, elle le doit à un don divin de la Sainte Trinité qui enrichit des trésors de la Création, du Salut et de la Sanctification, les enfants de cette famille humaine particulière que nous formons[5].

 

12. L'Ordre de l'Unité d'Antioche adopte comme son propre emblème, le cri du Psaume 69 que Jean l'Évangéliste attribue au Seigneur Jésus : « Le zèle de Ta maison me dévore ». Nous cherchons par là à suivre les traces de notre Seigneur qui a offert Sa vie pour l'Église, Son Épouse, Maison du Dieu Vivant.

 

13.   L'Ordre de l'Unité d'Antioche exprime son appartenance à l'Église locale en portant, par la prière, les joies et les douleurs des paroisses de son entourage, selon la voie des Fils de l'Alliance ou Bnay Qiyomo dont parle Aphraate, le Sage Persan.

 

14.   L'Ordre de l'Unité d'Antioche cherche, là où il se trouve, à revivifier l'héritage antiochien, qu'il soit spirituel ou culturel. Ce faisant, l'Église manifeste son visage glorieux et nous nous relions avec la foi des ancêtres. La Mère Abbesse devra définir, avec son Conseil, le cadre de la collaboration avec la Maison d'Antioche comme une institution appartenant à l'OUA, dont l'objectif est la sauvegarde du patrimoine antiochien.

 

15.   L'Ordre de l'Unité d'Antioche cherche l'appartenance, parfaite et publique, à l'Église locale, à travers l'Évêque du lieu. Cet Ordre est, d'après le CEO n° 413-414, un Ordre de droit éparchial indépendant, dont la supérieure est supérieure générale.

 

16.  Il est souhaitable que l'OUA exprime son appartenance à l'Église d'Antioche, dans la diversité de son héritage, en plantant, symboliquement, toutes les Croix patriarcales sur son monastère-mère, tout en sauvegardant le droit de vigilance à l'Église grecque-melkite Catholique, dans la personne de l'Ordinaire du lieu [6].

Le service de l'Unité de l'Eglise

 

17. Les Apôtres ont fondé l'Église d'Antioche et Saint Pierre était son premier Évêque. Elle a expérimenté la première mission apostolique ad gentes [7] . À partir d'elle ont été lancées les expéditions apostoliques universelles. Elle est aussi l'unique Église à avoir expérimenté la plénitude de l'unité entre les composantes essentielles de l'Église primitive que sont les juifs et les gentils. C'est pourquoi, l'histoire fondatrice de l'Église d'Antioche est un exemple pour nous, dans notre désir de restaurer l'Unité de l'Église Catholique. 

 

18.  Toute division dans l'Église Une, défigure la révélation de son mystère. Elle est UNE, où qu'elle se trouve. Si donc, l'Église locale est la manifestation, ici et maintenant, de l'Église Universelle, la division occulte son universalité et affaiblit, dans les membres d'un même corps, le dynamisme de la Communion et de la transmission de l'Esprit-Saint. C'est pourquoi le plus grand danger qui guette l'Église locale est la division et le plus grand service qu'on lui rend est la pleine consécration pour renouveler le mystère de son unité, c'est-à-dire sa cohésion locale et universelle.

 

19. Divers facteurs ont provoqué la division, qu'ils soient historiques ou géographiques. Cependant la raison principale de la division est le péché qui agit dans le cœur de l'homme [8] et à partir de lui, dans le cœur de la communauté, elle dévie les voies du Seigneur. C'est pourquoi, celui qui s'est consacré pour la cause de l'Unité doit combattre le péché et ses traces dans son cœur.

 

20. Les serviteurs de l'Unité marchent derrière l'Agneau de Dieu qui porte les péchés du monde, où qu'Il aille  [9], portant son infamie, c'est-à-dire la Croix et suivant l'exemple du Maître qui lava les pieds de Ses disciples dans l'immensité de Sa tendresse, leur demandant de faire de même et de s'aimer les uns les autres comme Il les a aimés. Il n'y a pas de plus grand amour que l'Amour du Sauveur, Notre-Seigneur Jésus- Christ qui a offert Sa vie pour nous car Il nous a aimés.

 

21. L'unité commence à l'intérieur de la communauté qui forme une petite église domestique. La communion que nous cultivons et dont nous avons soin devient comme un plant qui peut être transplanté dans l'Église-mère. Notre communauté est un laboratoire de communion et le gage de l'unité des cœurs en Jésus.

 

22. La prière d'intercession du prophète Élie sur le Mont Carmel, après sa restauration de l'autel au nom des douze tribus d'Israël, symbolisant l'unité des enfants de Dieu dispersés, est une source d'inspiration pour le service d'intercession qui est au cœur de la vocation de l'OUA.

 

23. Notre Ordre considère que son service d'intercession en faveur de l'Unité a pour axe la prière sacerdotale du Seigneur dans l'Évangile selon Saint Jean, chapitre 17.

 

24. Les membres de l'OUA émettent les trois vœux religieux d'obéissance, virginité et pauvreté qui sont simples en endossant le petit schème angélique. Ces vœux prennent le caractère solennel lors de l'octroi du Grand Schème Angélique, d'après le Droit CEO.

 

25.  Par fidélité à leur vocation, l'Église leur permet d'émettre un quatrième vœu et qui est celui de servir la Communion entre les membres du Corps du Christ, en réponse à la prière sacerdotale du Messie.

 

26. Les membres de l'OUA professent le plus grand amour à toute personne appartenant à une autre Église locale. Nos communautés accueillent des vocations de toutes les Églises à condition que l'aspirant demeure, malgré son appartenance monastique, fidèle à son Église, enrichissant avec sa richesse notre communauté religieuse.

 

27.  Nous adoptons la liturgie de l'Église grecques-melkite catholique mais il est souhaitable de célébrer dans d'autres rites auxquels appartiennent les membres de la fédération monastique. Il est aussi possible d'embrasser l'un de ces rites comme rite principal suivant ce que décide la communauté locale avec l'Ordinaire du lieu et suivant les nécessités pastorales concrètes.

 

Le service prophétique de la seconde venue du Christ

 

28.  L'appel de l'OUA pour servir la Communion Ecclésiale se déploie dans le cadre de la Foi et de l'Espérance en la deuxième Venue du Christ, pour laquelle l'Épouse se prépare et s'orne de la Gloire de Dieu[10]. Quant aux fils de l'Église, ils doivent se préparer prophétiquement et amoureusement à cette venue, car nous sommes conviés aux Noces de l'Agneau [11]. Avec l'Esprit et l'Épouse nous, dans l'Église d'Antioche, clamons : «Morân Atha», c’est-à-dire, Viens Seigneur Jésus ![12]

 

29.   Notre communauté veux se préparer à cet évènement avec l'esprit dupliqué du prophète Élie, tombant sur Jean le Baptiste. Cela se fera en préparant les voies du Seigneur, par le fait de ramener les cœurs des pères vers leurs fils et les cœurs des fils vers leurs pères [13]. Aussi, à la suite du Verbe fait homme, rien d'humain ne nous est étranger. Nous ne voulons pas nous exiler loin de la réalité humaine mais seulement nous éloigner de l'esprit du monde  [14]. Quant à l'esprit du monde, c'est une volonté à l'intérieur de l'homme qui résiste au Royaume et s'approprie les biens de la création pour un projet individualiste, étranger à la volonté salvifique de Dieu. Jésus, quant à Lui, n'est pas venu pour juger le monde mais pour le sauver [15]. Le projet du monde est soumis au Prince de ce monde, c'est-à-dire le diable qui alimente l'homme ancien par la concupiscence de la chaire, la concupiscence des yeux et l'orgueil de la vie qui ne sont point du Père mais du monde  [16].

 

30.   Nous voulons aider le Seigneur à panser les blessures de la Grande Tribulation [17] qui s'empare de toute personne humaine  [18]. Aussi accueillons-nous toute âme en quête de consolation ou d'accompagnement ou de redressement. Cet accueil est soumis au discernement de la Mère Abbesse avec son Conseil quant aux détails du séjour, de l'aide spirituelle ou moral à donner. Nous sommes aussi prêts à ouvrir les portes de nos monastères à tout enfant sans abri, d'après les lois et les usages locaux.

 

31. L'OUA ouvre les portes de ses monastères à toute personne humaine qui cherche à construire son humanité sur le rocher qu'est le Christ, d'une construction spirituelle et solide, afin qu'elle devienne un Temple de l'Esprit-Saint. C'est ainsi que nous convions qui le veut à partager le cours de la vie communautaire et les enseignements octroyés à la communauté à condition que le visiteur ne pénètre jamais dans la clôture et qu'il ne s'immisce point dans les arcanes de la vie communautaire.

 

32.   Tout visiteur ou résident doit se conformer à une charte qu'il établira et signera et à laquelle il devra être fidèle.

 

33. Dans le cours de la préparation prophétique pour comparaître devant le Seigneur, la communauté cherche à être la voix qui crie dans le désert  [19] pour le témoignage et l'admonestation sans que cette activité d'enseignement et d'évangélisation menace les spécificités de la vie anachorétique communautaire.  

 

 


[1]  Réf. 914/2000-VIII, en date du 14/9/2000, selon les CEO n°435

[2]  Décret Éparchial susmentionné.  

[3]  1 Jn, 1

[4] Cf. Actes 2,8

[5] Ps. 45, 11-15

[6] Les articles encadrés sont de caractère canonique

[7] Voir Actes, chap. 11à 14

[8] «Mémoire et Réconciliation, l'Église et les péchés du passé», Comité théologique international 

[9] Ap. 14, 4

 

[10]  Ap. 21, 10

[11]  Ap. 19,9

[12]  Ap. 22, 20

[13]  Lc 1, 17

[14]  Jn 16, 17

[15]  Jn 12, 47

[16] 1 Jn, 2,16

[17]  Mt 24, 21

[18]  Mt 24, 22

[19]  Lc 3,4