Histoire de notre Monastère & de notre village


Notre monastère (Qara, Syrie) est très ancien et béni par le sang de plus de 120 moines martyrs. Jetons un coup d'œil sur son passé glorieux.  Dans la 2ème partie nous vous présentons l'histoire prestigieux de notre village.

Notre village de Qara est situé à la frontière Libanaise, sur l'autoroute entre Homs et Damas.
Notre village de Qara est situé à la frontière Libanaise, sur l'autoroute entre Homs et Damas.

Epoque Byzantine: 330 - 1453  

 

Le monastère est construit sur une forteresse romaine du Ier siècle ap JC. Les ruines romaines sont devenues un monastère au VIIème siècle (découverte dans l'enceinte du monastère  d'une pièce de monnaie de Justinien II - 565-578). Un saint ermite éthiopien, Moïse,  fils de roi, d'abord moine en Egypte et en Palestine, vint s'installer au monastère S. Jacques vers 628. Puis il sortit fonder la laure appelée plus tard de son nom: "Mar Mussa"[1]. Bien que plusieurs monastères existent dans le village de Qara  situé à 3 km du monastère, celui de Saint Jacques le Mutilé est le plus fameux, visité par un grand nombre de pèlerins venant de partout, surout du Hauran, apportant de riches présents.

 

An Mil:  premier cycle de peintures murales dans l'Eglise du monastère. XIII ème siècle: deuxième cycle de peintures murales. Ces dernières fresques ont presque totalement disparu. Des plus  anciennes  une bonne partie a subsisté, notamment grâce à l'intervention de la DGA (Direction Générale des Antiquités) qui envoya au début des années 70 une mission pour déposer tout ce qui pouvait l'être. Ces fragments sont  actuellement gardés en sécurité jusqu'à ce qu'il soit possible de poursuivre le chantier de restauration, commencé  avant 2000.

Restes de fresques dans l'Eglise du monastère
Restes de fresques dans l'Eglise du monastère

Période Mamelouk [2]: 1250-1517

 

En 1266, le sultan mamelouk égyptien Baybars [3] pille le monastère, et exécute tous les moines, sauf ceux qui parviennent à s’échapper en se cachant dans les abris en terre et les puits. Il rassemble  les chrétiens du village, les massacre et ordonne de convertir en mosquée - qui existe toujours - l'Eglise de Saint Nicolas datant du IIIème siècle. Originairement c'était un temple du soleil qui fut transformé en Eglise par Sainte Hélène lors de son passage dans la région à la recherche de la vraie Croix [4].  La population de Qara fut fortement réduite. Sachant qu’il y avait 11 Eglises à Qara et même un évêché datant de l’an 150 après JC, on peut estimer que la population était d’environ 35.000 personnes. Cette population était majoritairement chrétienne avec quelques juifs. Aujourd’hui Qara ne comporte  pas plus de 500 chrétiens sur une population de 20.000 habitants.            

 

En 1403 les turkomans font un raid sur Qara, pillant le village et le monastère.

 Période Ottomane: 1453-1917

 

L'araméen (syriaque) se parlait depuis Qara jusqu'à la côte libanaise tandis que vers l'est on parlait l’arabe.  Le monastère de Saint Jacques était donc un centre de traduction de textes liturgiques et bibliques du grec et du syriaque en arabe. Des manuscrits arabes provenant du monastère S. Jacques-le-Mutilé se retrouvent dans des bibliothèques européennes (Vatican, Berlin).

 

Voici quelques témoignages datant de cette époque: 

 

1453-1600: "Anciennement il n'y avait pas d'ordre religieux en Orient sauf Saint Jacques, qui était le siège principal. Le monastère Deir Saydeh de Ras Baalbeck lui était affilié. Plus tard ce monastère fut rattaché à l'Ordre Chouéïrite dont la maison-mère est le monastère Saint Jean de Khonchara » [5] . 

 

1477: Un Evangéliaire arabe porte ce colophon: "Le travail de ce Livre béni fut achevé le 5 du mois béni de juin de l'année 6958 de notre père Adam, 1477 AD - et ce par la main du serviteur du Christ, le misérable parmi les prêtres, Joachim Bassem Kassis, portant l'habit de la repentance, fils de Ibrahim du village de Hanak, il habitait en ces jours dans le monastère de Saint Jacques-le-Mutilé, à l'ouest de Qâra... [6]"

 

Vers 1720: fin du Monastère. Un colonel ottoman accompagné de  quelques officiers, est accueilli par les moines pour passer la nuit, demandant que les portes soient laissées ouvertes pour repartir tôt le matin. Mais la nuit tombée ses officiers ouvrent les portes du Monastère pour l'armée ottomane qui entre en trombe, rassemble la communauté et massacre 120 moines, puis pille les lieux. Les rares survivants qui se sont échappés par les canaux romains se réfugient à Ras Baalbeck au Liban dans le monastère de Deir Saydeh à 40 km à l'ouest de Qara.

 

1750: Grand tremblement de terre. La source d’eau est bouchée et les terres agricoles se sont desséchées. Ensuite l'Emir libanais Jahjah Al Harfouch pille le monastère en 1790. Entre 1760 et 1800 les moines Manassé, Siméon et Arsène quittent pour le monastère libanais de Saint Jean de l'ordre Chouéïrite. Un an plus tard un faux moine passe par le monastère et vole les derniers manuscrits. Peu de temps après un prêtre et un moine de l'ordre Chouéïrite s’installent à Saint Jacques, essayant de restaurer ce qui pouvait l'être. En 1836, le patriarche Maximos Mazloum définit le nouveau statut du monastère: A partir de ce moment, il appartient  au diocèse catholique de Homs, Hama et Yabroud. Les Chouéïrites envoyèrent à nouveau deux moines pour prendre soin des lieux. 

 

Ensuite il y a des  traces incertaines d’une vie monastique à St Jacques: en 1930 le dernier prêtre du village, qui prenait soin du monastère, décéda. Après cela, le monastère est resté en ruines... jusqu'en:


Août 1993 Mère Agnès Mariam - carmélite déchaussée de Harissa Liban–  visite les ruines du Monastère pour la première fois. Les travaux de restauration commencent le 14 Juillet 1994 avec la bénédiction et l’aide de l'évêque du lieu Mgr. Ibrahim Nehmeh.

 

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[1] P. Paolo dall’Oglio, Il restauro del monasterio di San Mosel’Abissino, Nebek, Siria, p. 11

[2] Mamelouks (en arabe, mamluk, « esclave blanc »), dynastie issue d’une milice composée d’esclaves [que les Egyptiens ont importés et qui ont fait tomber le pouvoir égyptien], essentiellement turcs et circassiens, qui régna sur l’Égypte de 1250 à 1517.

[3] Durant son règne en Egypte le pays devint l’état musulman le plus puissant au Moyen-Orient.

[4] cf. La chronique de Noueïri intitulée "Nihayat al irb", Paris 1578, pp. 73-74)

[5] Chronique Al Dur Al Marsouf fi tarikh al Shouf de Hanania Al Mounayer, Bibliothèque orientale, Beyrouth)

[6] Bibliothèque de Sadnaya n°4